Devant l'enseigne de Nihon Godo Kaisha (G.K), un écriteau en ardoise mettait en lumière les compétences juridiques de l'artisan-marionnettiste. Cette information jurait avec l'image que le petit commerce dépeignait : un cagibi décrépit prétendant vendre farces et attrapes, marionnettes, masques et costumes.

Nihon savait fort bien que la localisation de son échoppe de fortune n'aidait pas pour les affaires, tout comme la kyrielle de services qu'il proposait. Dans le versant oriental de la Forge du Monde, perdu au cœur de la banlieue de la capitale économique, la boutique s'ouvrait rarement. Hélas, le marché de l'immobilier de Sekaitan ne faisait aucune fleur aux réfugiés comme lui. La défiance des clients à l'égard de l'étrangeté du gérant consolidait la relative indigence qui frappait ses investissements.

Souriant comme un soleil, le jeune commerçant ne se laissait pas démonter. Son chiffre d'affaires se composait à quatre-vingt-dix pourcents de chalands. Ces aventuriers séjournaient quelques jours au pays du Fer et tombaient - par hasard - sur sa boutique. Les communautés érudites de l'Harmonie et de l'Érudition aidaient beaucoup : le droit des affaires était un secteur maîtrisé par peu de Renkinjutsushi, préférant les savoirs occultes. L'autre versant, les dix pourcents, cristallisait les rares habitués qui s'étaient épris des talents du réfugié - la plupart étant, en réalité, des retraités cherchant un reliquat de compagnie en sa personne.

Bras démontés, écrous, rouages, ressorts et rouleaux jonchaient son bureau qui donnait sur l'entrée. L'intérieur du magasin était à l'image de son bureau : un monde de mystères et de magie où des pétards côtoyaient d'imposantes figures boisées. Adossé contre sa chaise, un rayon solaire barrait une fraction de son faciès, les pupilles céruléennes du juriste dévoraient pages après pages le Shōhō (商法, Code de commerce).

— Le Seireitei doit se doter d'une juridiction commerciale !

Un franc rire résonna dans la pièce à demi-vide. Çà et là, quelques automates tentaient de ranger le désordre de leur maître. Voilà bien longtemps qu'ils ne faisaient plus attention aux éclats de celui-ci…