Errance.

Solitude.

Deux mots qui résumaient ma situation. J’étais arrivé à Toji depuis quelques semaines afin de m’acclimater à la région. Notre petit groupe devait s’y réunir prochainement et après ce petit contrat au près de ce manieur de marionnette, j’avais à cœur d’œuvrer à un tout autre projet. J’avais contacté quelques connaissances à Ame et payé le prix cher pour obtenir une information rare. Jusqu’à présent, je n’avais pas eu de retour et voilà qu’au détour d’une ruelle du bazar aux milles couleurs un homme capuchonné me laissa un mot griffonné à la main.

Sa lecture était simple. Quelques indications, un plan de fortune et c’était tout. Comme quoi, même les plus petites choses simples pouvaient valoir beaucoup, cela dépendait de la valeur qu’on souhaitait lui offrir et dans le cas présent, la dépense n’était pas inutile.

C’est ainsi que je me suis retrouvé en plein désert au sein de Kaze. J’avais rapidement préparé mon voyage, rassemblant vivres et matériel nécessaire à mon voyage, mais j’allais m’apercevoir que ce n’était peut-être pas suffisant. Si les premiers jours se passaient sans encombre, croisant quelques nomades qui comme moi se baladaient à dos de chameau, au bout de plusieurs jours de voyage, les difficultés commencèrent à pointer le bout de leur nez. La nourriture en premier lieu, plus l’eau dans un second temps. J’avais eu vite fait de rationner mais il me fallait trouver une solution rapidement. J’avais bien une idée en tête, faire surgir une nouvelle oasis, mais je préférais garder cette carte pour plus tard. Au final, les nuits tombantes, je profitais de l’obscurité pour chasser les petits noctambules. Scorpions, gerbilles ou autres lézards, c’était là de la survie plus qu’autre choses.

Et enfin, après je ne sais combien de jours d’errance et un chameau commençant lui aussi à être en peine, voilà qu’au loin, une grande tour émergeait des sables. Par chance, le trajet était plus court que prévu, et pour cause, la tour n’en était pas vraiment une, un palmier peut être. Mais aussi étrange que soit cet arbre, j’avais beau lever la tête, je n’en voyais nullement le bout ou ses branchages. Mais ce n’était pas l’élément le plus intéressant se trouvait devant moi.

Un volatile ...

Le pauvre oiseau semblait avoir plusieurs flèches plantées dans le corps. Observant l’animal, les yeux révulsés se tournèrent vers moi.

« Achève-moi » caqueta-t-il.
« Alors que je suis venu expressément pour toi ? »

Sortant le papier chiffonné de ma poche, je le laissais tomber sur le sable. J’étais finalement quelque peu ravie de cette situation, même si cette dernière n’était pas celle que j’attendais. Dans d’autres circonstances, d’autres que moi auraient pu voir leur aboutissement réduit à néant mais j’avais des ressources que d’autres ne possédaient pas.

« Je sais qui tu es, ce que tu as. Tu es dans une situation délicate alors je te propose un marché. Je te viens en aide et en retour tu m’apportes ton soutien ? »
« Ce n’est pas vraiment comme cela que ça fonctionne … » clama l’albatros meurtri.

Seulement, sans autre réponse de sa part, je m’attelais à sauver l’animal. Même si ce dernier ne semblait pas des plus convaincu, il se laissa faire lorsque je retirais les flèches plantées dans son corps et l’une de ses ailes. Si je parvenais à stopper le saignement, aussi étrange qu’il soit, je n’arrivais pas à soigner les blessures du volatile.

« Je te l’avais dit. L’énergie naturelle requiert bien plus … »

L’énergie naturelle ? Je réfléchissais là de longues minutes avant de comprendre ce dont il était question. Avant d’entreprendre un tel voyage j’avais fait quelques recherches et désormais je me sentais quelque peu démuni. Après mûre réflexion une seule idée me vint vraiment en tête et ce n’était pas la plus plaisante qu’il soit.

Sortant de ma besace quelques champignons qu’il me restais, je posais cela sur un vélin afin de ne pas le mêler au sable environnant. Un scalpel de chakra dans la main droite, d’un coup net je coupais mon bras gauche au-dessus du coude avant de rapidement cautériser la plaie. La douleur était bien présente et de grosses gouttes de sueur perlaient sur mon visage sous le regard imperturbable de l’oiseau blessé. Déposant mon bras coupé avec les champignons d’un geste assuré j’utilisais finalement ma carte maitresse, cette pierre philosophale afin de donner vie à une sorte de champignon de chair, palpitant comme un muscle, une sorte de créature florale sigillaire.


« Mange donc … »

L’oiseau semblait savoir qu’il n’avait rien à perdre et s’exécuta. Au fil des bouchées, j’avais la nette sensation que ses blessures se résorbaient. Voilà donc le résultat de l’énergie naturelle en action ? Quant à moi, je rassemblais toutes les forces qu’il me restait, surchargeant mes propres capacités de guérison pour modeler un nouveau bras. Usant de mon bras intact, tel de la pate à modeler, j’étirais la chair, reconstruisais les os et resensibilisais les nerfs. Ce fut une rude et longue affaire au terme de laquelle je sombrais dans un profond sommeil.

Lorsque je me réveillais, le ciel étoilé nocturne était au-dessus de moi. Allongé dans le sable, malgré la nuit je n’avais pas froid. Me redressant finalement, je constatais que mon ancien patient désormais guéri me couvrait de ses ailes.

« J’ai dormi longtemps ? »
« Trois jours. »
« Pourquoi tu es resté du coup ? »
« Tu m’as sauvé … nous sommes désormais liés toi et moi. »

Nous étions liés …

Reposant ma tête, je me rendormais satisfaite, le bras gauche encore douloureux et engourdi.