Les rires gras envahissent les ruines d’un bâtiment à moitié dévoré par la destruction, relique oubliée d’une civilisation du passée. Le soleil commençait à se coucher et on pouvait entendre du grabuge de toute sorte, les résidents des lieux étant loin des gentils villageois de Tsubomi… Entre les insultes, les cris sauvages, les bouteilles brisées, c’est une véritable cacophonie qui s’opère entre les murs. Mais l’Inuzuka était occupé à autre chose, alors qu’il dévorait à grande bouchée l’énorme bol de ramens en face de lui. Mastiquant le plus fort possible, il n’hésitait pas à laisser de côté les bonnes manières alors qu’il débouchait une bouteille de vin d’un coup de pouce, levant le coude assez haut pour bien entamer la bouteille malgré sa gorge le brûlant.

Bien sûr que ce n’était pas du vin, mais un breuvage spécialement préparé par ses hôtes, alors qu’autour de la table se trouvait bien un trio de barbares patibulaires qui dévisageaient le jeune homme, amusé par son audace. L’audace d’un minot sortit de nulle part, et qui demande à jouer avec eux ! S’il n’avait pas séché un de leur gars d’un coup de tête, ils ne l’auraient même pas pris au sérieux. Mais le voilà à déguster son repas tranquillement, malgré l’aura meurtrière des Yaban qui laissaient apparaître leur envie de déguster. Jotaro et Kaida étaient habitués aux coutumes des barbares, et avaient multipliés les interactions avec eux au fil des années. Même si tous ne le connaissaient pas personnellement, ça ne les empêchait pas de venir le voir à l’occasion, pour lui demander de rendre service…

C’était la raison précise de sa présence dans ce coin reculé d’Hametsu, en plein milieu d’une planque d’un petit groupe de séparatistes Yaban. Les barbares ici présents ont suivi l’exemple d’un des leurs qui, il y a quelque temps, a initié un coup d’état contre Yaban Riku. Même si le bonhomme qui avait tenté le coup avait plutôt mal fini, il n’empêche qu’une graine avait été semée dans l’esprit de certains barbares, ambitieux. C’est le cas du chef de cette nouvelle bande, un certain Yaban Kiikii qui avait le tic de grincer souvent des dents. L’homme en question redressait son chapeau pour fixer Jotaro qui terminait sa dernière nouille, le bol désormais vide.



L’Inuzuka a un demi-sourire alors qu’il pousse de la table tout ce qui le gêne, le bol, les baguettes, la bouteille d’alcool… Tout se brise en fracas par terre alors que le garçon n’en a visiblement rien à foutre, la mâchoire des barbares se resserrant alors qu’ils commençaient à montrer leur agacement face au flegme du protecteur. Est-ce qu’il ne les prenait pas au sérieux ? Au contraire ! Il sortait le grand jeu avant que les hostilités n’aient réellement commencé, sachant pertinemment que s’il souhaitait sortir son épingle du jeu, il allait devoir utiliser davantage que ses muscles. L’un des membres du trio sortait les dés, envoyant 5 d’entre eux à Jotaro, le chef Kiikii et le troisième barbare silencieux.



« P’tite merde… » répondait Yaban Kiikii en grinçant des dents, prenant ses dés en main pour commencer la partie. Les trois joueurs réalisaient leurs lancers, l’Inuzuka fronçant les sourcils face à sa petite paire de 3 qui ne pourrait pas rivaliser avec la double paire de 5 et de 2 du grincheux. Le troisième réalise lui aussi une meilleure paire que Jotaro, mais finit par perdre à son tour. Le rire gras de Kiikii envahissait la pièce alors qu’il récoltait le petit tas de ryos avec sa grande patte d’ours, certaines pièces tombant par terre alors qu’il semblait bien content de pouvoir rabattre le clapet du chiot. « On la ramène moins hein ? Bon, et si on pariait quelque chose de plus intére… » Il n’a pas eu le temps de terminer sa phrase alors qu’on frappe à la porte de l’arrière-salle.



Jotaro arquait un sourcil alors qu’il passait son bras par-dessus le dossier de sa chaise, observant d’un oeil la porte en question. Qui, à part lui, était assez fou pour vouloir entrer en territoire barbare ?

Mercenariat : Yaban Kiikii, étoile montante du clan barbare, prépare un coup d'état dans le dos de Riku. Un Yaban fidèle à Riku a jugé bon de faire appel aux services de Jotaro pour neutraliser Kiikii, de sorte à ce qu'un conflit interne au clan ne leur tombe sur la tronche. L'objectif initial est d'empêcher Kiikii de réaliser son coup.
Mécanique : amateur de Saikoromeijin, le rp utilise les règles du jeu. L'argent ayant peu de valeur aux yeux de Kiikii, il a développé sa propre variante : le vainqueur de la manche doit désigner un des perdants, qui se verra incapacité d'un de ses membres. Si un non-Yaban perd l'usage de ses 4 membres, le jeu est terminé et les Yaban tenteront de l'éliminer. Si un Yaban perd l'usage de ses 4 membres, alors ses frères tenteront de le protéger.

▬ Allons à Hametsu.

— Pourquoi aller dans le bidonville ?

▬ Parfaire ton éducation martiale. Je veux que tu affrontes les Yaban.

— Héhé. Tu as confiance en mes capacités, je le savais !

▬ Non. Tu es aussi faible qu’un chat.

— Ouais, ouais, ouais… Tu connais des Yaban, toi ? Autre chose à me révéler ? Un fils caché peut-être ? Shugyoku Hanzi ? Hanze ? Hanzou ?

▬ Cesse de faire le pitre. J’ai détruit l’une de leur gargouille, Yaban Gozen, le Cramoisi.


Les deux âmes-liées gagnèrent la frontière commune au pays en Ruine. Ils passèrent à l’exact endroit où, quelques années en arrière, le belluaire avait affronté la vigie Yaban. Le torii, détruit suite à leur altercation, n’avait pas bougé de place. Le sang du Bouclier de Hametsu continuait, malgré les hivers, à repeindre l’armature en bois de la porte spirituelle.

L’apparence de la Momie ne jurait pas avec les âmes esseulées qui constellaient le Pays-Bidonville. Les rues dévastées, où l’odeur de la destruction se mêlait à la chair pourrie, étaient noyées par les infirmes et les miséreux. Quelques enfants s’approchèrent du binôme, aussitôt congédiés par le regard impérieux de l’Irbis. Pour la première fois depuis leur pacte, Nihon eut l’occasion de voir le vrai Hanzō.

Le Sakki (殺気, Soif de sang) du belluaire se propageait dans l’horizon. Le fondateur de Nisshoku tremblait à l’idée de devoir affronter le plein potentiel du Kuchiyose, qui déambulait simplement, les pattes jointes au niveau des lombaires. Sous cette carcasse poilue se terrait un monstre de puissance. L’oreille de la Panthère des Sables capta un son. La signature sensorielle du Kurenai, unique en son genre, fut ferrée par les belliqueux gens d’armes.

Quatre Yaban apparurent. Une paire de griffes caressait la gorge de la Bête. Une épée-hachoire barrait leur route. Une faux à trois lames se plaça de sorte à pouvoir décapiter les deux versants d’une même pièce. Enfin, un arc, à plusieurs dizaines de mètres, les mettait en joue.

▬ Baissez vos armes, les caniches. Vous ne voulez pas affronter Sen no Shoukin Hanzō.

La prononciation de ce surnom électrisa les quatre séparatistes. Les dextres des combattants commençaient à trembler, alors que la sueur perlait de leur front. De son index griffu, l’ancien Capitaine-Corsaire chassa lentement la faux, puis la paire de griffes. Dans la panique, l’adepte du kyūdō libéra la flèche, qui fusa à toute vitesse vers la tête de son protégé. Les phalanges du Rubicond avalèrent le morceau de bois ; la pointe de fer s’arrêta à quelques millimètres de son œil.

▬ Menez-nous à votre Chef. J’ai une dette de sang à payer.


Un poing heurta à plusieurs reprises une tôle en fer jouant le rôle de porte. L'une des gargouilles pénétra la salle de jeux improvisée pour murmurer, dans le creux de l'oreille de Kiikii, un message. À l'écoute de cette information, les pupilles du Yaban se dilatèrent, alors qu'un sourire barra son faciès.


Les âmes liées s'extirpèrent du rayon lumineux et pénétrèrent la salle tamisée. Éclairée par une poignée de bougies, tapissée de condiments et d'alcool, la pièce incarnait à merveille l'ambiance macabre qui pourchassait le clan de Riku.

▬ Je ne pense pas t'avoir autorisé à prononcer mon nom.

Plusieurs Yaban bondirent de leur siège et agrippèrent l'insolent.

▬ Vous allez vous blesser. Nihon, mon protégé, jouera pour moi. En cas d'échec, il payera le prix du sang pour feu Yaban Torikage et pour la défaite de Yaban Gozen.

Le maître des lieux agita son index dans les airs, un geste circulaire intimant à ses soldats de lâcher prise. L'Once s'enfonça dans les ténèbres, dans le dos de Jotaro et du Zénith. Deux billes luminescentes déchiraient le voile d'obscurité. Au même titre que les sbires de Kiikii, il veillait sur l'Unificateur.

— Sympa l'ambiance. Je m'occupe de sa dette.

Le séant de la Momie s'écrasa contre une chaise rajoutée quelques secondes plus tôt. Sans attendre, les dés s'échangèrent. L'inconnu à sa droite obtint une paire de trois ; lui un brelan de trois ; l'hôte un brelan de six et l'un des bellicistes une paire de un. Un simple claquement de doigt suffit pour punir le comportement outrancier de son invité. Les mains jointes, une frappe marteau s'écrasa contre l'épaule du Président de Tsubomi. Un craquement sinistre retentit : l'épaule se fêla et se luxa sur le coup.

— On sait ce que l'on risque, mais que gagne-t'on en cas de réussite ?

Pendant un moment, l’Inuzuka s’est demandé si un énième Yaban allait rejoindre la partie, mais il était loin de la vérité. Un inconnu, aux premiers abords, du nom d’Hanzo. Un nom qui faisait tout de suite réagir le chef Yaban, qui avait un sourire grinçant plaqué sur le visage alors qu’il voyait les deux nouvelles silhouettes pénétraient les lieux. Jotaro observait l’homme et l’animal, un duo aussi atypique que Kaida et lui-même… Mais le Protecteur reconnaissait le Kuchiyose, du moins en apparence, puisqu’il se souvient l’avoir vu participer à l’effort global lorsqu’il a fallu ériger un rempart face à la créature millénaire. Alors l’homme à ses côtés, le fameux Nihon, devait être celui qui s’était fait remarqué sur le rivage par la Garde Blanche…

« Ha, peut-être qu’ils vont pouvoir nous aider. On va pas dire non à une paire de pattes supplémentaire, surtout qu’ils ont pas l’air d’être tant potes que ça. » Exprimait la tortue, à l’abri des oreilles humaines dans la pièce. Jotaro restait là sans sourciller, se contentant de préparer ses propres lancers de dés. S’ils étaient là pour rembourser une dette de sang auprès des Yaban, y'a de grandes chances que ça se termine mal cette histoire… d’une façon ou d’une autre. Alors les dés sont jetés, et un rictus apparaît en coin de lèvres de l’Inuzuka qui, sans pouvoir protester, sent le coup taper là où ça faisait mal. Un craquement sec se fait entendre, Jotaro contenant du mieux qu’il pouvait un cri de douleur en se mordant la lèvres inférieures, mais son regard déterminé ne quittant pas un instant les yeux amusés du prédateur face à lui.

Une question soulevée, Kiikii se détend sur sa chaise alors qu’il place ses deux pieds sur la table, s’allumant un cigare.



Il crapote avant d’inspirer profondément et de relâcher une bonne bouffée de fumée. « Mais ça vous l’saurez que si vous arrivez à sortir avec vos deux jambes. C’est mal parti pour toi, la tortue ninja. » Un rire gras échappe ses lèvres alors que l’Inuzuka lui rend un sourire mystérieux. Pendant qu’ils discutaient sur la possible récompense, Jotaro avait réalisé un signe avec sa main encore valide sous la table avant qu’il ne la tente en direction de Nihon, la paume non-visible pour Kiikii et ses gros bras. « Je ne me suis pas présenté : Inuzuka Jotaro, enchanté ! Je dois dire que ça fait plaisir de croiser quelqu’un de plus civilisé que ces brutes. » Petite pique envoyée aux Yaban qui faisaient craquer leurs phalanges, mais ce qu’espérait l’Inuzuka c’est le moment où son compagnon de fortune allait lui serrer la main, pour lui appliquer un sceau [1].

« Hé, le mec couvert de bandages. » Les mots de la tortue pouvaient être clairement entendus si le sceau faisait bien effet, Jotaro ayant donné la capacité à Nihon de comprendre Kaida. « Ces gars-là joueront le jeu que jusqu’au moment où vous gagnerez une ou deux manches, puis ils vont s’énerver. Voilà ce qu’on te propose : une collaboration en bonne et due forme pour faire tomber le cowboy en face de nous. » Jotaro prenait en main ses dés, se préparant pour la prochaine manche alors qu’il tournait les petits cubes dans ses doigts valides. Perdre son second bras serait catastrophique, au même titre que perdre une jambe. Il allait devoir réfléchir out of box pour se sortir de ce pétrin, et l’arrivée de Nihon était peut-être son occasion en or. « Jotaro te plantera pas, y’a pas plus réglo que lui dans le Continent. Si t’es prêt à nous suivre, contente toi de poser les deux mains sur la table. » Un code simple, et pas trop suspect.

Nouvelle manche, et tous se préparent à jeter leur dés. Bien sûr, alors que tout le monde allait réaliser son premier lancer, Jotaro élève la voix : « Au fait Kiikii, t’aimes pas ma tronche ou bien ? » ; « Bah ! T’as encore le cran de l’ouvrir ? Pourquoi tu poses une question alors que tu connais la réponse ! » Tous jettent leur dés au signal du Yaban, mais alors que les dés terminent de rouler… « J’sais pas, je me suis dis que t’allais corriger la sale gueule de ton pitbull à côté de toi avant de nous viser. » ; « DE QUOI BATARD ?! » Comme prévu, le Yaban s’échauffe et se lève de sa chaise, plaquant sèchement sa grosse main contre la table. Un timing que Jotaro attendait pour donner un coup de genou sous la table [2], la secouant assez pour faire voler les dés qui se baladaient aléatoirement sur la table.

« Et en plus il fout en l’air les dés ! On est où là ?? » ; « VOS GUEULES, OU JE VOUS BUTE ! » Au tour de Kiikii de s’énerver, essentiellement parce que les secousses ont fait bouger ses jambes qui étaient à la base posées tranquillement sur la table. Les Yaban bien échauffés, c’était peut-être l’occasion d’échanger des dés avantageux avec Nihon…

Mécanique : amateur de Saikoromeijin, le rp utilise les règles du jeu. L'argent ayant peu de valeur aux yeux de Kiikii, il a développé sa propre variante : le vainqueur de la manche doit désigner un des perdants, qui se verra incapacité d'un de ses membres. Si un non-Yaban perd l'usage de ses 4 membres, le jeu est terminé et les Yaban tenteront de l'éliminer. Si un Yaban perd l'usage de ses 4 membres, alors ses frères tenteront de le protéger.

Ajout : La collbaroration de Jotaro et Nihon peut permettre d'exploiter certaines failles dans la partie. Le trashtalk, si bien utilisé, peut énervé les Yaban au point de leur faire perdre leur concentration et de mal jouer /!\ Attention à ne pas trop les provoquer, au risque de lancer tout de suite les hostilités. La triche quant à elle peut s'opérer de bien des manières (en utilisant des compétences, en profitant des failles faites par le trashtalk etc) et peut donc permettre des actions risquées, mais qui peuvent donner un avantage !

Résumé :

Hametsu no Kuni était un pays unique en son genre ; de nombreux États érigeaient la loi du talion au rang de lex naturalis, aucun pourtant ne faisait d’elle la norme unique. Pour un réfugié-juriste de sa stature, savoir - et dans le cas présent, voir directement - que le tissu social était intimement lié au Dialogue Mélien, l’amusait. Les peuplades du Pays-Bidonville, en arguant qu’ils détestaient les étrangers, et en se comportant de cette façon outrancière à l’égard de leurs adelphes, ne faisaient que répliquer à une échelle micro les conquêtes des superpuissances. Pour les cinq Belligérants, le Continent n’était qu’un Hametsu en attente d’être gagné, où seule la loi du plus fort avait sens. Ainsi, lorsque Jotaro tendit cette main pleine d’espoir, Nihon ne put s’empêcher de la saisir avec fermeté.

— Nihon.

Le jeune homme au verbe haut et à l’allure de héros conjurait le mauvais sort. La Momie, victime du sortilège, put entendre les propos de la testudinidae. Adepte des sigils, Nihon ne fut pas surpris plus qu’outre mesure : Jotaro était un Inuzuka. S’il était capable d’extraire ou d’empoisonner un corps avec des sceaux, pourquoi pas offrir la compréhension bestiale ? Le Diminué hésita quelques secondes.

Certes, Hanzō souhaitait le voir affronter des Yaban. Encore fallait-il le faire intelligemment. Eu égard à ses capacités actuelles, le Tennō pouvait gérer une partie des effectifs adverses, mais pas l'entièreté. Par ailleurs, il savait que son Kuchiyose ne lui prêterait pas main forte : cette tâche lui revenait à lui, uniquement. La main gauche se posa sur la table, signifiant au binôme animal qu’il roulait avec eux. Quelques secondes plus tard, les phalanges cramponnaient leurs dés.

Les iris violines du cocon anthracite s’arrêtèrent sur leur lancer de dés. Une seule idée le préoccupait : comment prendre l’ascendant en retournant les règles du jeu contre ces primates ? L’Inuzuka eut la réponse. Il déclencha une joute verbale, aussitôt suivie par une réaction sortant du Cinquième Cercle. Le péché de la Colère tombait dans le piège du dompteur de tortue. Les dés volèrent dans les airs, puis retombèrent sur la table, éparpillés. Machinalement, les singes reprirent leurs dés initiaux, alors que la malice du binôme de fortune venait de frapper : le dé 6 de Nihon se retrouva dans le jeu de son comparse, et inversément pour ce trois salutaire.

Les dernières relances se terminaient : Jotaro eut une main pleine, Nihon un brelan de trois, le Yaban rien de bien fou et Kiikii… Kiikii arracha la victoire au dernier dé, sortant un carré de 1. La conséquence fut sans appel : une masse de métal s’écrasa contre le genou droit du héros de Tsubomi. Une nouvelle fois, l’ire du chef des séparatistes le prenait pour cible.

— Je commence à comprendre les règles du jeu. Bien, avant de relancer les dés…

Un sourire se dessina sur le faciès de l’enturbanné, à peine voilé par ses atours atypiques.

— Je suis le préposé d’un homme qui souhaite rester dans l’ombre. Il envisage de construire, ici, à Hametsu, l’un de ses premiers centres de commerce. Il souhaite offrir à votre pays le moyen de reprendre son indépendance économique. Il n’y a pas d’entourloupe. Vingt pour cent des bénéfices contre la gestion autonome du HSBC, le Hametsu Sekai Bōeki Chūshin.

Nihon captait l’attention pour mieux la détourner. Son index et son majeur se lièrent et s’apposèrent contre la table, depuis le dessous. Un glyphe s’incrusta contre le bois [1]. Le Juinjutsu diffusait dans l’air ambiant - peu à peu, de sorte à ne pas éveiller l’attention - du poison à l’état gazeux. La fine pellicule agissait comme un hypnotique : ce somnifère, dans un premier temps, rendait somnolent et amorphe, et dans un second temps, offrait un voyage vers le pays des songes.

— Si un jour les habitants de Kusa, ou les Yaban, souhaitent redevenir un Etat, cette étape peut être intéressante. Vu que nous sommes entre gens de Grand Banditisme, j’imagine que vous avez quelqu’un en tête ? Pourquoi pas toi, Kiikii ? Devenir un futur Bo Takeshi, ça a de la gueule, non ?

Spoiler:

Le plan était pourtant de donner l’avantage au duo de fortune, et pour être honnête ils ont eu un grand avantage face aux Yaban. Mais la chance n’était pas de leur côté, alors que le dernier dés du Yaban scelle le destin de la jambe droite de l’Inuzuka. Serrant fermement le poing contre le table, à la même intensité qu’il serrait les dents, un râle s’échappait d’entre ses lèvres alors que les barbares observaient avec malice la douleur tirailler le jeune homme. Kiikii et ses cousins s’esclaffent de rire alors qu’il tapote la table, le fait de parier un membre à chaque manche était réellement le summum du jeu du hasard.

Le regard dur, Jotaro observe ses vis-à-vis avec amertume alors qu’il saisit fermement ses dés, prenant son mal en patience. Kaida de son côté, un niveau en dessous, remarque la main discrète du garçon couvert de bandages qui appliquait un sigle sur la table, mais l’animal n’arrivait pas à savoir quel effet il pouvait bien avoir. L’Inuzuka, de son côté, écoutait attentivement les propos de Nihon, qui parlait de récupérer l’indépendance de Hametsu par le biais du commerce, une économie autosuffisante. Cela amusait le chef Yaban qui tapotait du bout de l’index son cigare, faisant tomber la cendre sur un coin de la table. « Et tu comptes vendre quoi ? Des fruits et légumes en promotion ? Faut garder les yeux en face du trou le calciné : ce trou à rats s’en sortira jamais. » Grosse bouffe de fumée, il ancre ses yeux ambrés dans ceux de Nihon avec un sérieux jusque là jamais vu pour les deux protagonistes : « C’est pour ça que je vais rassembler les boys, faire un dernier petit carnage, et partir vers un endroit plus lucratif, si tu vois ce que je veux dire ! » ; « Ouuuuh yeah ! Il est temps de rappeler au monde qui sont les Yaban ! »

Les Yaban présents dans la pièce s’excitent et commencent à jubiler en unisson, galvanisés par l’ambition de Kiikii qui souhaite réaliser un tournant dans l’histoire du clan barbare. Impossible de les insulter dans ce genre d’ambiance, lorsque leur moral est au maximum, et que l’Inuzuka été doublement perdant… Alors Jotaro serrait entre ses doigts valides ses dés, sur lesquels s’inscrivaient de minuscules symboles sombres qui se superpossaient sur les points noirs des dés, une préparation qui lui sera utile au cas où les choses puissent dégénérer. [1]

« Si Kiikii en veut pas, moi je ne dis pas non, les détails peuvent toujours se discuter dans de meilleures conditions que dans l’arrière-salle pourrie d’un conquérant, mais ton idée me plaît Nihon. Je préfère ceux qui construisent, plutôt que ceux qui détruisent. » ; « Bon allez fini le blabla, troisième manche ! » L’excitation du barbare n’égalait que son sadisme alors qu’il remuait délicatement ses dés dans sa main. Étrangement, Jotaro ne faisait plus tant que ça attention à la douleur au niveau de ses membres incapacités… Était-ce dû à l’adrénaline ? Difficile de savoir alors qu’à nouveau les dés étaient jetés, et que tous semblaient perturbés au point de ne décider que de relancer qu’un seul dés, sauf Nihon qui se démarqua des plus belles avec une grande suite.

Le troisième Yaban, agissant comme le bourreau qui exécutait les ordres, s’adonna à la tâche qui lui incombait alors qu’il jetait son dévolu sur le surnommé Pitbull qui voyait son épaule déboîtée, à l’image du premier tour contre l’Inuzuka. Kiikii crachait un glaviot sur le côté tandis que Pitbull grognait. L’opportunité de planter un pic là où ça faisait mal n’échappait pas au maître tortue, qui ricanait derrière son col en adressant un regard en coin Pitbull, lorsqu’une nouvelle fois les dés étaient lancés, pour la 4ème manche. « Pour un Yaban t’es plus fragile que ce que je pensais, t’inquiète pas la deuxième fois ça fait pas si mal que ça. »

L’insulte ne dura pas si longtemps puisque Pitbull se leva subitement pour armer son bras valide et envoyait son poing en direction de la figure de Jotaro. Cette fois-ci, pas besoin de cogner la table puisque le bassin du Yaban tapa en plein dans le meuble alors que l’Inuzuka décide de se transformer partiellement pour encaisser l’attaque. Son cou double de volume alors que sa tête se recouvre d’écailles [2] alors que la dextre de Pitbull frappe sa joue, le faisant basculer en arrière et le faire tomber de sa chaise. Pitbull s’apprêtait à sauter par-dessus la table pour poursuivre son assaut, mais la main lourde de Kiikii tomba tel un couperet sur son épaule, le forçant à se rasseoir avec violence. L’aura meurtrière du Yaban envahit la pièce alors que ses paroles annoncent la couleur de ce qui allait se passer. « Vous commencez à me gaver tous les deux, j’ai pas le droit de profiter d’une partie tranquille ?! À la prochaine occasion, je donne vos tripes en pâture à mes chiens qui attendent dehors. »

Tournant sa langue dans sa bouche, Jotaro reprenant une apparence humaine, il crachait un mollard sanglant par terre avant de forcer sur son bras valide et pouvoir se relever sans l’aide de personne. La chaise remise sur place par Kaida, il s’installait à sa place et affichait un léger sourire alors qu’il avait une marque rouge sur la joue. « Bon, heureusement que je me souviens de mes dés… »

Résumé :

Encore une fois, le clan Yaban s’illustrait par son manque de compréhension du monde et des rouages qui le gouvernaient. Cette cellule de séparatistes ne comprenait même pas l’intérêt d’avoir son indépendance et de profiter de son contrôle sur sa propre économie. Il fallait du chemin avant que les shinobi de cet acabit ne comprennent que la société repose sur des leviers…

— Un endroit plus lucratif ? Je ne savais pas que le code Yaban s’était perdu depuis votre installation ici. C’est tellement plus simple de devenir une forte puissance militaire et économique. Après, moi… Ce que j’en dis… Je ne suis qu’un simple commerçant. J’imagine qu’une vie de limier fidèle aux ryos est plus intéressante.

Les paupières de la momie se plissèrent légèrement, illustrant le caractère sardonique et railleur de cette tirade. De toute évidence, le Yaban en chef n’était qu’un sot. Un être bourru dont la puissance suffisait à pallier son manque de matière grise. Nihon lui avait servi, sur un plateau d’argent, en des mots clairs, les clés du Continent. Un léger soupir quitta ses bronches et témoigna de la déception du mercantiliste. Déception aussitôt chassée par son partenaire d’infortune : l’Inuzuka.

Le président de Tsubomi se montrait plus vif qu’il ne semblait l’être. Derrière son apparence de shinobi railleur, le maître des tortues possédait une masse cérébrale suffisante pour comprendre cette main tendue. Certes, il disait vrai : la présente situation ne permettait pas une discussion pleine, entière et éclairée du projet. Les deux compagnons de galère devaient d’abord triompher de cette menace, pour ensuite laisser le jeu des discussions précontractuelles s’opérer. Tous les deux disposaient d’un avantage certain sur le trio de Yaban : ils ne se connaissaient pas.

— Jotaro, c’est ça ? J’avoue ne pas trop être familier aux us et coutumes de votre territoire, les Kusajin héhé. Raconte-moi un peu ton histoire, comment tu t’es retrouvé dans cette galère ? Moi, moi j’ai un gros matou sur le dos, comme tu as pu le comprendre.

La senestre de la Momie effleura l’épaule de l’homme au verbe haut et alla agripper son épaule, de sorte à former une étreinte. En somme, de passer son bras par derrière sa nuque ; une accolade amicale qui jurait avec l’ambiance macabre de l’arrière-salle. Cette tentative de joyeux luron couvait une action plus perfide. Les phalanges, en effleurant le corps du joueur, apposèrent un juinjutsu qui se grava sur la peau de son omoplate [1]. Le glyphe, indolore, devenait une barrière naturelle pour le poison qui se répandait dans la pièce.

Juste après, hélas, les Kusajin laissèrent parler leur pulsion et leur virilité exacerbée. Un poing rencontra une tête écailleuse, et les deux bellicistes furent châtiés par la pression spirituelle que dégageait Kiikii. L’aura meurtrière qui se dégageait du chef des brigands entraîna la réaction, quasi-automatique, de la panthère terrée dans l’ombre. Sa gueule s’ouvrit et quatre canines proéminentes déchirèrent le voile de ténèbres. Une simple étincelle pouvait déclencher les hostilités, tous le savaient.

▬ Concentrez-vous sur la partie, les macaques.

Fais pas l’ancien parce que t’as accumulé les têtes, Hanzo. Il n’y a que des bandits ici donc reste donc dans ton ombre, et laisse ton incapable gérer ta dette. On s’occupera de vous tôt ou tard, n’est-ce pas les gars ? BAHAHAHA Les trois bellicistes se mirent à rigoler de façon concomitante. La partie reprenait. Les dés roulaient et les paupières s’allourdirent. Était-ce l’alcool, cette plante verte ou les tirades du commerçant qui les rendaient somnolents ? Ils n’en savaient rien, mais décidèrent de se méfier un peu plus : cette sensation de fatigue devait bien venir de quelque part.

Hélas, avant de mettre le doigt sur le cœur du problème, la victoire happa l’attention du trinôme. La Momie venait d’obtenir une main pleine. Le regard violine de l’enturbané s’enfonça dans les iris de Pitbull, mais le maître des lieux ne l’entendait pas de cette façon : il comptait montrer au Kuchiyose qu’il ne craignait rien, ni personne. Ne vous arrêtez pas, continuez à jouer, j’ai un châton à empailler les gars. Sans sourciller, la paume s’était refermée contre son avant-bras, dont l’os se brisa après la flexion à quarante-cinq degrés du membre.

— Sacré coup de main, vous avez visiblement l'habitude. Hélas, j’ai peur que le niveau est trop en deçà, pour l’instant je suis intouché… Et je pense bien le rester héhé.

Deux victoires consécutives qui se fêtaient dans l’arrogance. Il n’y avait pas à dire, l’invocateur tenait bien de son invocation… N’était-ce… Pas l’inverse normalement ?

Spoiler:

Avec sa nouvelle marque sur la nuque, Jotaro se replace correctement sur son siège afin d’observer la victoire complète de l’enturbanner. Demi-sourire sur les lèvres, l’Inuzuka aurait bien aimé sabrer une bouteille pour féliciter le retournement de situation, contrôlé vilement par le duo. Mais l’occasion de briser le second bras de Pitbull disparue au moment où Kiikii, désireux de montrer les gros bras, se dispensa de son propre membre pour le reste de la partie. Il ne démordait pas son appartenance à un clan craint pour ses déviances barbares. Néanmoins, le jeune homme ne ressentait plus la fatigue qui devenait de plus en plus prononcée au fil des minutes, la dextre de Nihon ayant certainement à voir dans l’histoire.

« Du coup ton grand projet c’est de ramener le nomadisme à ton clan, c’est ça Kiikii ? Tu penses avoir ta chance contre Riku ? » Une question innocente en apparence, mais les allusions étaient claires : rarement un talent comme Yaban Riku s’est révélé ce dernier siècle, parmi la tribu barbare. À côté, la légende de “Yaban Kiikii” était encore à prouver… « T’en fais pas, tu seras aux premières loges la tortue ! Je te garderai comme animal de compagnie une fois que je me serais occupé de ton autre bras et autre jambe. » Décidément, la malice qui peut couler des lèvres de certains restait une odeur putréfiante aux narines de l’Inuzuka.

Enfin, vient la prochaine manche qui allait sceller le destin de la partie. Une certaine tension régnait dans la salle, puisque déjà deux Yaban avaient perdu une manche, et il était clair qu’ils n’attendaient qu’une chose : c’était l’occasion de découper l’imprudent protégé de Hanzo. Cependant, profitant des yeux fatigués de son audience, Nihon réalisait l’exploit : une main complète de 5 se trouvaient devant lui, réaffirmant sa place de champion de manches consécutives. Le sursaut de Nihon n’était pas pour déplaire à Jotaro, contrairement aux séparatistes qui aiguisaient leurs dents entre elles, notamment signifié le grincement distinctif de Kiikii. Une main sous la table, l’Inuzuka faisait signe à Kaida de sorte à ce qu’il se tienne prêt, l’épiderme de la main de Jotaro commençant déjà à changer alors que les muscles de la tortue se développaient sous ses écailles…

« JE T’AI VU TRICHER ! JE VAIS TE COUPER LA MAIN QUI TE RESTE ! » annonce Pitbull en tapant du poing contre la table, se levant sur ses pieds… Mais cette fois-ci, c’est Kaida qui saute par-dessus la table, se transformant sous les yeux de tous pour prendre l’apparence d’un homme-tortue, et foutant son poing contre le nez du Yaban manchot pour l’envoyer voler contre le mur. [1] Jotaro, de son côté, changeait d’apparence pour incarner une tortue, qui s’accrocha fermement au dos de l’animal avec sa patte encore valide. [2] Le troisième Yaban prenait sa masse en main, alors que Kiikii posait sa main sur la table, son sourire carnassier déchirant le cigare entre ses dents. « Passons au plat de résistance les boys ! »


Vu de l’extérieur, on ne pouvait qu’entendre des bruits d’agitations, d’engueulades, de rires, depuis l’arrière-sale du bâtiment délabré. Mais, contre toute attente, c’est une explosion sans précédent qui fait voler en éclats les 4 murs de la pièce. Plusieurs silhouettes s’extirpent des débris, sans trop de mal, alors que tous prennent position dans cet immeuble à moitié ravagé par le passage d’un météor il y a de ça plusieurs décennies. Jotaro, installé sur la carapace de Kaida, observait les Yaban se redressait alors que Pitbull, au nez cassé, et Kiikii, faisant tomber son long manteau pour laisser apparaître un corps sculpté par les duels, venaient d’ouvrir les premières Portes. L’Inuzuka, ayant l’apparence totale d’un animal, parlait à Nihon dans le langage de la faune : « Mon objectif c’est de neutraliser Kiikii. Pas besoin de le tuer, un Yaban fidèle de Riku attend sagement à l’extérieur pour récupérer les séparatistes à la petite cuillère. J’ai juste besoin d’être proche du Yaban pour sceller son chakra, et le tour sera joué. » ; « RAMENEZ VOUS LES BARBARES, QUE JE FASSE DES COLLIERS AVEC VOS TRIPES ! »

Wow, Kaida était remonté tout d’un coup…

Résumé :

— SAI-KO-RO-MEI-JIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIN !!!!

La senestre de l’embaumé s’écrasa contre la table. Les phalanges de la Momie libérèrent cinq dés, tous frappés par le même chiffre : 5. Cette prouesse, si rare, fut aussitôt catégorisée comme de la triche. Un sourire anima la lèvre du Héros du Rivage. Nihon ne pouvait reprocher la méfiance excessive des Yaban séparatistes. Elle était légitime. L’empoisonneur avait profité du Juinjutsu narcoleptique pour relancer l’ensemble de ses dés - la relance n’enlevait en rien la chance lunaire du Zénith.

Dans l’ombre des deux protagonistes, le félin aux yeux iridescents se prépara à l’offensive des marchands de guerre. Le bond de la tortue humaine démarra les hostilités. Les coups pleuvaient, la colère s’accumulait et les éléments du décor - chaises, tables, dés - flottaient dans les airs. Le chasseur de primes aux mille cibles se joignait à la danse de l’écailleux Kaida. Les deux bêtes collèrent leur dos et déversèrent une salade de métacarpes aux simiens. Cette première danse souffla la pièce et généra assez de dégâts pour que les fidèles de Kiikii puissent ouvrir les premières portes sacrificielles.

— Bon, bon, bon. On se fera une revanche plus tard j’imagine, entre nous Jotaro. Pour l’heure, occupons-nous d’apprendre les bonnes manières à ces singes. Si tu nous laisses un peu de temps, Hanzo pourra mettre fin à leur combativité.

L’ancien Nurarihyon s’amusait de la présente situation ; les nombreuses semaines qu’il avait passées dans le désert avaient forgé une nouvelle personnalité. À bien des égards, il se considérait comme un shinobi à part entière. Sa main gauche incanta le signe de la chèvre. Deux senbon vinrent se glisser entre son index et son majeur, et entre son majeur et son annulaire [1]. Une goutte de liquide violine perla des lames assassines. D’un geste circulaire, les deux projectiles fusèrent, puis s’enfoncèrent dans les parois de la pièce - le mur à droite et le mur à gauche [2]. Nihon dressa une barrière translucide : quiconque franchirait le voile serait alors frappé par un poison aveuglant. La Momie toucha de son index les deux hommes-tortues, de sorte à incruster dans leur derme un antidote-sceau [3].

— Je te laisse danser avec eux, je m’occupe d’être la dernière barricade.

Le belluaire se lança dans une très longue série de signes incantatoires [4]. Son entreprise était simple : transformer le nuage hélant le sommeil en un nuage paralysant. Ainsi, l’air vicié qui s’était accumulé dans leurs poumons se transformerait en fers quasi-indestructibles. Pour ce faire, le Shugyoku devait continuer à répéter les signes pendant plusieurs secondes, voire minutes

Spoiler:

Y’avait-il une réelle différence entre le jeu et le combat ? Sur le moment je ne ressentais rien d’autre qu’un pic d’adrénaline qui provoquait en moi ce sentiment d’excitation, d’anticipation alors que la confrontation avec les barbares approchait de son paroxysme. Une paire de poings écaillés s’associait aux griffes du bipède pour tabasser les joues de nos hôtes, mais il en faudra bien plus pour coucher une bonne fois pour toutes un Yaban. Un filet de sang sur leurs lèvres, Kiikii et Pitbull crachaient chacun un glaviot ensanglanté tout en souriant, leur cri se transformant en véritable coup de tonnerre alors que les environs se mettent à trembler.

« Ok, laisse-nous le front pour l’instant ! »

Kaida prend appui sur ses pattes pour s’élancer en direction du premier venu, celui qui n’a pas arrêté de nous taper sur le système à tous les deux : le surnommé Pitbull. [1] Rapidement, l’homme tortue arrive en face du barbare qui a les yeux injectés de sang, la colère n’étant plus qu’un euphémisme pour décrire la rage qui bouille dans ses entrailles… mais est-ce que Kaida en avait quelque chose à foutre de ses sentiments ? Non ! Ses deux larges mains écaillées agrippent fermement le bras unique du Yaban, avant que dans un hurlement combattif Kaida ne le soulève d’un coup pour le projeter plus loin en direction du mur translucide mis en place par Nihon. [2]

Dans le dos de Kaida, je m’accroche fermement tout en gardant les yeux rivés sur l’action. J’attendais le moment opportun pour déclencher un dernier cadeau mis en place il y a quelques minutes de ça, une surprise spéciale façon Inuzuka. Lorsque je vois le Yaban à la masse, San, faire mine de prendre à revers mon partenaire, je décide d’utiliser ma patte valide pour réaliser un mouvement incantatoire, semblable à un mudra : les dés marqués de mon sceau s’animent et se transforment en tortues qui viennent de saisir les pieds de San. [3] Le Yaban grince des dents en voyant les petits animaux sortir de nulle part et tente bien de s’en débarrasser, mais l’ombre des deux pattes de Kaida s’approche à grande vitesse de sa tête à travers un drop kick. [4]

Bien sûr, le Yaban ne se laisse pas faire et met en avant son arme, qui subit violemment l’impact avant de faire reculer les deux combattants dans leur coin respectif. Un genou à terre, Kaida pose une main sur sa jambe encore tremblante, un sourire amusé s’élargissant sur sa tête de tétrapode alors que ça faisait déjà un moment que ça le démangeait de se battre nez à nez avec un Yaban. Du coin de l’oeil je regarde où en est Nihon, si la progression de ses mudras arrivaient à leur terme avant que le chef Yaban ne décide d’entrer également dans la danse après qu’il ait trouvé un moyen de contourner la barrière translucide…

« IMPACT ! » criait Kaida alors qu’il dressait ses deux bras massifs devant lui dans une garde solide, une onde de choc approchant à grande vitesse qui percute de plein fouet ses deux membres. [5] L’impact nous propulse en arrière de plusieurs mètres, alors qu’une vilaine plaie commence à apparaître sur les écailles de Kaida, alors qu’une légère fumée s’échappait du poing tendu de Yaban Kiikii. Kaida et moi-même froncions les sourcils, l’ennemi ayant décidé d’opter pour une attaque à distance pour échapper au piège de l’homme couvert de bandages.

Dans une grande inspiration, l’homme tortue se remet en position, se préparant à sortir le grand jeu dans les secondes qui suivront, afin de mettre un terme à ce combat une bonne fois pour toutes…

Résumé :

Les frappes du Testudinidae alimentent la verve de la cohorte de Yaban. Hématome après hématome, blessure après blessure, les forces des séditieux croient de manière exponentielle. La partie de Saikomoreijin - Poker d’As - n’était qu’un jeu de dupes, depuis le début tout avait été prévu pour placer Kiikii et ses hommes dans une position favorable. Comment ? En se cassant bras et jambes. Ce type de blessure, pour le commun des mortels, induit l’impossibilité de combattre avec sa pleine puissance. Les bellicistes, quant à eux, sont en mesure de transformer ces handicaps en Joker. Loin de partager la faiblesse des autres peuples, ils puisent dans leur douleur pour se transformer en berserker.



Les pattes du Belluaire se rejoignent et mettent fin à la - très - longue série de signes incantatoires. L’as du Shoton, génie du Ninjutsu, plongea son regard courroucé dans celui de Kiikii. L’insidieux gaz, expulsé par un Juinjutsu, capté par les poumons des hôtes de la barbarie, est la proie de cette technique. Rictus narquois, les barbares avaient préféré jouer les primates, plutôt que de chercher à quitter une pièce noyée par le poison. Hanzo chasse la somnolence au profit d’un poison paralysant. Une décharge d’électricité parcourt l’échine des Yaban : le sommeil latent se change en perte de force.

Le crâne de San percute le sol. Pitbull tombe à genoux. Si le premier homme sombre dans l'inconscience, le second est simplement paralysé. Ses yeux peuvent suivre le déplacement de Jotaro et son compagnon animal, mais son corps refuse d’avancer. La connexion synaptique est rompue ; le shinobi souhaite hurler de rage, s’arracher de ce cocon invisible, mais l’épée de Damoclès a déjà tranché la question.

— Jotaro ! C’est votre moment. Je m’occupe de protéger Hanzo, récupérez les deux hommes.

La panthère des neiges écrase l’un de ses genoux au sol. Son faciès expulse une quantité importante de sueurs. Son souffle est court et suit sa cage thoracique qui bat la chamade. Maintenir cette paralysie coûte une quantité de Chakra astronomique, même pour lui. Depuis un tatouage gravé sur sa sangle abdominale, la senestre de Nihon arrache un uchigatana depuis les frontières de la réalité. Dos à son Kuchiyose, face à la menace, le bretteur place son arme en barrage. Le tranchant de sa lame suinte un liquide violine, qui s’écoule sur le sol et dévore petit à petit le plancher.

— Le boss est encore debout… Tapez-le assez fort pour que le poison fasse effet !!

Le chef des Yaban séditieux est ralenti, il peine à respirer, sa vision est trouble, mais il tient debout. Malgré la dose de cheval qu’il a ingurgité, il parvient à outrepasser la technique de l’Once. Fortement diminué par cet exploit, il ouvre une énième porte, qui libère une vague d’énergie dans le décor. Ce n’est pas une porte comme les autres : aux portes de l’inconscience, il descelle son potentiel et surcharge son organisme. L’ouverture de la sixième porte hèle une aura verte qui s’enroule autour du corps de Kiikii.


Sans attendre, le Lieutenant de Riku écrase ses poings dans le vide. Une fois, dix fois, cent fois. Il déclenche un déluge de frappes, qui projette des coques d’air comprimées - similaire au Juken. Chaque coque d’air s’embrase par effet de frottement. Une centaine de métacarpes enflammés fusent vers Jotaro, Kaida, Nihon et Hanzo. Cette technique, dans cet espace exiguë, est en mesure de leur ôter la vie.

Spoiler:

Malgré que je sois sur le dos de Kaida, j’avais pu ressentir à travers son corps la puissance de l’impact du Yaban, qui pourtant ne devait pas être au summum de sa forme à cause des effets de statut du camarade Nihon. Les bras encore tremblants, l’homme tortue se secoue les écailles avant de se frapper les poings l’un contre l’autre, bandant ses muscles pour mettre à cran son corps et pouvoir repartir au quart de tour dans la mélée. Les efforts de Kaida n’ont pas étaient vains, puisqu’enfin le second duo homme-animal réalisaient leur stratégie et modifiaient la propriété du poison ambiant.

La paralysie gagne en grande partie nos adversaires, et c’est telle une ombre meurtrière que Kaida s’élance en direction des ennemis. Pitbull pouvait voir de ses pupilles dilatées la progression fulgurante de l’homme tortue, qui bondissait agilement vers lui en élevant son genou pour que l’articulation percute de plein fouet le menton exposé du Yaban. [1] Plusieurs paires de dents s’envolent, les yeux de Pitbull se retournant alors qu’il tombe lourdement au sol. Dans l’élan, j’avais quitté le dos de mon compagnon animal, atterrisant sur le ventre du Yaban fortement touché par la paralysie et plaquant ma patte valide contre son abdomen : une marque sombre apparait sur sa peau visible alors qu’une grande partie de son chakra se retrouvait scellé, dans l’incapacité d’exploiter sa puissance en cas où il se relevait plus tard. [2]

Mais rien ne m’avait préparé à la soudaine déflagration d’énergie qui me faisait rouler en arrière, me rapprochant des pieds de Kaida qui couvrait son visage de ses bras pour se protéger des petits débris balayés par la surcharge du Lieutenant Kiikii. Cette aura verte illumine la pièce, mais plus encore que ce voile émeraude sur ses épaules, c’était ses mouvements de mains se déplaçant à une vitesse trop grande pour être captée à l’oeil nue qui produisaient des flammes mortelles filant dans notre direction.



Une myriade de flammes volaient sur notre groupe, alors que la moindre pierre prise dans son chemin était pulvérisée. Moins de 3 secondes avant l’impact. Deux paires de yeux animales fixent la vague mortelle, alors que Kaida pose sa main sur ma carapace et que les veines de chakra pulsent entre nous deux. Les battements de nos coeurs s’accélèrent et se synchronisent, notre unique respiration se surperposant alors que dans une déferlante de chakra nos écailles ne faisaient qu’une.

Une masse sombre s’élève des ruines environnantes, faisant de l’ombre à Nihon et Hanzo alors que c’est sous la forme d’une tortue bicéphale et démesurée que Kaida et moi nous élevions. [3] Notre rugissement fait trembler tout le bâtiment qui menaçait de s’écrouler suite à l’émergence de nos techniques suprêmes respectives. D’un pas lourd nous nous enfonçions profondément dans le sol qui ne résistait pas à notre poids hors du commun, alors que nous sentions les flammes des coups de poing du Yaban se percuter contre notre épaisse carapace. Chaque coup faisait mal, alors que nous sentions la majorité de nos écailles se fissurer puis se détacher de notre blindage, des gouttes de sang qui s’évaporaient la seconde d’après à cause de la friction de l’air causée par l’assaut du Yaban.

« ON VOUS LAISSE GÉRER POUR LA SUITE !!! »

L’assaut dura plusieurs secondes, même si chaque coup donnait l’impression d’être frappait par des marteaux chauffés à blanc. Dans l’état actuel des choses, il était impossible pour nous de l’approcher, alors on se concentrait sur la seule chose qu’on était reconnu pour : protéger les autres. Les rugissements bestiaux se mélangeaient au hurlement du Lieutenant alors que tout le bâtiment tremblait, les murs complétement rasés par les dommages collatéraux causés par le Yaban. Nous n’étions même pas certains de l’état de nos deux adversaires précédents, alors que la seule chose que nous avions en face de nos yeux était un mur de flammes qui perdait en ampleur.

Peut-être avions nous pris trop de coup dans la tête, ou alors les effets de la surcharge pointaient rapidement le bout de leur nez alors que notre conscience s’effaçait petit à petit, l’inconscience nous ouvrant lentement les bras pour un repos mérité. Mais dans ce laps de temps qui, même s’il ne durait que quelques instants en réalité, nous donnait l’impression d’avoir vécu une éternité cette confrontation, nous savions que le Lieutenant était tombé avant nous. Tout devient sombre, et Kaida et moi sentons nos corps se séparer pour reprendre leur forme originale, notre bras incapacités par l’effort surhumain cumulé.

Il ne restait plus qu’à s’assurer que le Lieutenant ne se rélève pas de sitôt, même si j’étais persuadé que ses rêves de coup d’état allaient prendre fin aujourd’hui.

Résumé :

La sixième porte du Hiden sacrificiel est une dangereuse création. Le Berserker puise dans ses douleurs les plus intimes pour les transformer en arme de siège. L’activation de la chaîne brachiale, qui s’étend du deltoïde à la face palmaire des doigts, libère son boulet de canon ; le chef des séditieux se transforme en simili-baliste. Les carreaux du perce-muraille sont remplacés par des projectiles d’air comprimé, qui s’embrasent au contact de l’éther.

Une horde quasi-infinie de frappes carbonisantes se pressent aux portes du binôme de dompteurs. Le QG des félons tremble sous le courroux de son représentant. Une odeur de brûlé - comme si l’on avait préparé un grand bûcher sur la place centrale - se propage dans les ruelles attenantes. La chaleur, dégagée par ce raz-de-marée, place sous son joug les glandes sudoripares, et forcent l’épiderme de leurs propriétaires à produire une quantité anormale de sueurs, que les flammes oblitèrent aussitôt évacuées.

Nihon a vécu bien des conflits ces dernières semaines, dont la survenance d’un être antique : Ido-shima. Pourtant, c’est la première fois qu’il se confronte à une telle technique. La puissance de cet assaut dépasse - de loin - toutes ses espérances. Sous les bandes anthracites, un sourire anime les courbes de ses lèvres. Une pensée, brève, impétueuse, brave son esprit déterminé à protéger son Kuchiyose : l’Humanité, elle aussi, est capable de se transformer en monstre dévastateur. Les Créatures de Chakra devront les craindre, tôt ou tard. Il s’en fait la promesse.

Dans une communion bestiale, Jotaro et Kaida fusionnent pour devenir un nouvel être - ou la forme réelle d’une monstruosité masquée par les traits d’un humain ? - une tortue bicéphale à la taille titanesque. Les membres inférieurs du Bicéphale atomisent le plancher et côtoient les structures de la bâtisse. Les membres supérieurs pulvérisent les parois, et gagnent l’air libre, aux yeux de tous. Bientôt, c’est la tête qui propulse le toit à des lieux de leur position initiale. Hametsu assiste à un spectacle troublant pour un étranger, merveilleux pour un résident de feu Kusa.


Le dos de Jotaro, une carapace aux reliefs escarpés, produit une quantité ahurissante d’écailles. La cuirasse devient un blindage quasi-impénétrable. Les premières couches de protection sont broyées par le déluge. Les métacarpes du Yaban s’ancrent dans le cartilage, et le flot ne cesse pas. Tel un forgeron martelant sa pièce, les coups de marteau chauffé à blanc détruisent la moindre particule de kératine. Certes, la défense bestiale n’a pas su absorber la toute puissance du Yaban. Pour autant, elle a résisté assez de temps pour que le barbare s’effondre, et pour que leur peau commune ne soit brûlée qu’au deuxième degré.

La Chose ploie un genou au sol, et alors qu’elle sombre dans l’inconscience, le corps de l’Inuzuka et le corps de son animal se séparent, mettant fin à cette fusion contre-nature. Une déferlante de vent chasse les vestiges de la maison, qui s’envolent au loin. Une descente de Yaban, une dizaine d’hommes et de femmes, apparaît. Alors que le groupe se contente de baliser les lieux en empêchant aux curieux de s’approcher, le chef du groupe, un Lieutenant de Riku s’approche de Nihon, toujours l’arme en main.

— Baisse ton arme le maigrichon.
— Des renforts de Kiikii ? Dommage pour vous, c’est à mon tour de briller !
— On bosse avec l’Inuzuka pour faire tomber, idiot. Allez range moi ça, tu vas te blesser.
— Ah… Ah ouais ? Mince, j’étais chaud pour casser du traître.
— Vous en avez fait du boucan hein, les p’tits jeunes ont kiffé le coup de la maison-tortue. Bon boulot.
— Il s’en tirera ?
— C’est un rejeton de Hametsu, bien sûr qu’il va vivre. On est solide par ici. Circule maintenant.